Retour à la liste des publications

 Il s’agit en fait d’une réunion de ce que l’on peut considérer comme un conseil municipal actuel avec le syndic, le maire à cette époque, le procureur fiscal, le percepteur des impôts, à la requête du conseil de fabrique et du curé chargés de gérer les biens de la paroisse. Cette réunion a eu lieu le dimanche en fin d’après midi (issues de vespres dites et chantées) en l’église - alors seul lieu de rassemblement public de la ville - et annoncée par la cloche d’assemblée sonnante à la manière accoutumée. Il est permis de supposer qu’il y avait une sonnerie particulière pour cet évènement et que comme corollaire la tenue en était publique. Le compte-rendu en était officialisé par un acte dressé  devant un notaire et dûment enregistré.

 

  Louis Guilloire Conseiller du Roi et Avocat Général de la cour des Monnaies de Paris, reçu le 13 mai 1681 (Armorial de la Cour des Monnoyes de Paris au XVIIIe 1715-1790 par F .Blache -Gallica), propriétaire du Mesnil, y décéda le vendredi 21 novembre 1710  âgé de soixante dix ans et fut inhumé dans l’église le dimanche 23 (les archives ne précisent pas si cet inhumation eut lieu en cette chapelle). Préalablement il rédigea son testament devant Maître Perret (le père de Jean Baptiste)  notaire à Rochefort en Yvelines. Ce consistant document daté du 10 octobre 1710 se trouve dans le dépôt notarial de Rochefort conservé dans les Archives Départementales des Yvelines sous la cote 3E34 88. Nous nous sommes intéressés à l’item consacré à St Arnoult et plus particulièrement à ce qui avait rapport avec la chapelle St François.

 

1 Les seigneurs du mesnil et leurs successeurs

2 auront la chapelle de st francois dans laquelle on

3 continura toutes les confraternités  ( ?) et donations qui y

4 sont etablis, et dans laquelle chapelle lesdits seigneur

5 du mesnil y pouront poser des bancs non nuisibles

6 ny incommodes, et faire ci les ornements et decorations

7 qu’ils jugeront apropriés.

 

 Ce codicille nous apprend que Louis Guilloire s’était purement et simplement adjugé le droit d’utiliser à sa guise, cette chapelle qui de surcroît était le lieu de dépôt des restes du saint éponyme et de son épouse. Il ne semble pas que cette prétention ait été habituelle chez les propriétaires du Mesnil comme le précise le texte : il en abandonne la propriété et jouissance pour disposer avec les dits curé et marguillier ainsi qu’ils ont fait par le passé. Dans sa lubie, Guilloire avait poussé l’outrecuidance jusqu'à décorer cette chapelle à son goût  et en interdire l’accès à toutes personnes qu’il n’avait pas choisies, y compris le curé desservant ! Le comble de sa prétention fut atteint lorsqu’il stipula dans son testament que ce droit d’usage exclusif devienne celui de ses successeurs. On comprend mieux la fureur, y compris celle du curé, des habitants de St Arnoult. Malgré un legs intéressant relatif, entre autres, à la création d’une charge de maîtresse d’école pour les filles, les fabriciens refusèrent cette clause du testament car ils estimèrent que cela aurait conduit à une aliénation d’une partie de l’église. Il fallut attendre  19 années et l’engagement devant notaire du nouveau propriétaire du Mesnil, Charles de Poussemothe de l’Étoile, comte de Graville (Dictionnaire de la Noblesse – Hubert de la Chesnaye -Gallica), d’abandonner cette prétention pour que l’affaire se règle enfin et non sans une longue discussion. Cette longue discussion montre le traumatisme subi par les habitants devant les agissements du sieur Guilloire .

 

 

Outre ces péripéties, ces textes nous livrent quelques précisions à propos de l’éducation des filles au XVIIIe. La maîtresse d’école devait être choisie par le curé et avait pour mission d’apprendre à prier, à lire, écrire et à coudre. Nous y voyons la prééminence de l’Église sur l’enseignement. Les filles ne pouvaient approcher que l’apprentissage de la lecture et de l’écriture et semblaient être exclues de celui du calcul et elles demeuraient cantonnées dans leur rôle de futures maîtresses de maison ou servantes en apprenant à coudre. Mais cela n’était pas si mal car on avait au moins le souci de les sortir de l’ignorance. Nous pouvons être étonnés que cet enseignement soit réservé aux « pauvres filles de la dite paroisse » mais on peut supposer que les filles de milieu plus favorisé puissent être dotées de préceptrices. Un autre renseignement important concerne le montant des émoluments reçus par la maîtresse d’école : 102 livres. Alors que nous savons, d’après les données relevées à travers les archives, qu’un maître d’école recevait à cette époque jusqu’à 150 livres annuelles (Bulletin de Généaguide No 10), nous n’avons pratiquement pas de renseignements à propos de sa collègue. Pour situer ces gages, cette source nous apprend qu’au XVIIIe, un ouvrier qualifié gagnait par jour ouvré jusqu’à une livre (20 sols),  un ouvrier agricole 10 sols et qu’une famille pouvait vivre, mais très chichement, avec 200 livres annuelles. Nous mesurons combien le métier d’enseignant était bien peu considéré à cette époque.

 

 

Il nous reste à préciser où se situait cette chapelle St François. La seule piste que nous ayons est que « le sieur curé qui avoit par cette chapelle un passage de son presbytère dans le chœur de ladite église ». Elle devait donc être nécessairement située sur le trajet entre le presbytère et le chœur de l’église et avoir un accès par l’extérieur. De plus, cette chapelle devait être suffisamment correcte et assurer une certaine dignité pour y recevoir les reliquaires. L’examen des plans de l’église, obligeamment fournis par le président de la Société Historique, notamment celui du XVIIe le plus proche chronologiquement, nous montre une petite construction sur la façade nord de l’église. Cette extension de l’église possède deux caractéristiques : elle est située entre le presbytère ancien et le chœur et elle possède une communication avec le sanctuaire. De plus, si les cotes sont exactes, sa surface semble être suffisamment correcte pour en faire une petite chapelle. Cependant aucun passage vers l’extérieur n’est indiqué sur ce plan. S’agit-il d’une erreur ou d’une omission ? L’examen in situ des lieux nous laisse bien plus perplexes. Il s’agit maintenant d’un lieu frustre, étroit et sans grand intérêt, servant de débarras. Par contre, nous avons observé une fenêtre qui du côté jardin va jusqu’au sol, et cet orifice aurait bien pu être une porte. Nous pouvons penser que lors de la démolition du presbytère, ce lieu a subi un profond remaniement qui l’a complètement défiguré. En ce cas, seule une étude archéologique pourrait apporter une réponse. Nous avons également observé que si ce lieu est véritablement ce qui reste de la chapelle St François, il y est très difficile d’y suivre une cérémonie dans le chœur. En effet l’étroitesse du passage et l’épaisseur des murs donnent une vision très limitée sur le reste du sanctuaire. Mais était–ce le but recherché ? Finalement tout cela n’est guère convaincant et la localisation de ce lieu reste pour nous une énigme. Nous ne pouvons qu’être étonnés devant le fait que cette chapelle, suffisamment importante pour que l’on y dépose les reliquaires et qui a suscité tant de passion il y a deux siècles et demi, ait maintenant son souvenir complètement effacé de la mémoire collective de la ville.

 

Eglise XVII ème siècle  Marc Langlois-Bruno Dufaÿ

 

 

 

REMERCIEMENTS :

 

- À Madame Élisabeth Piétri chartriste et archiviste paléographe qui a contrôlé (et corrigé !) nos transcriptions.

 

 

testa guilloire077.jpg

Cliquez pour agrandir

Cliquez sur les images pour les agrandir

Page 1

Page 2

Page 3

Page 4

Page 1

Aujourd’huy  dymanche vingt septième jour

De novembre mil sept cent vingt neuf , issue de

Vespres, dites et chantées en l’église paroissialle

de St Nicolas de Saint Arnoult, la cloche d’assemblée sonnante

en la manière accoutumée à la prière et réquisition de Me Antoine Perret

prètre curé dudit St Arnoult, de Lubin Riffault, meusnier du moulin de

Villeneuve et Jacques Massè, marchand boisselier demeurant en ce lieu au

nom et comme marguilliers en charge de l’œuvre et fabrique de ladite

église de St Nicolas de Saint Arnoult, je, Jean Baptiste Perret, notaire audict

Saint Arnoult soussigné, me suis transporté au banc dudit œuvre

et fabrique ou etant sont comparus lesdits sieurs curé et marguilliers, lesquels

auroient représenté à sieur François Moutié,sindic de cette ville,Me

Henry Moutié,procureur fiscal, François Jamin bourelier, Robert Herisson

vigneron, Esprit Dumur, aussi vigneron, Pierre Rousseau,mareschal, François

Creste ,marchand drapier, Nicolas Perret ,aussy marchand drapier, François Martin

maître chirurgien, Jacques Benoist boullanger et Thomas Danel

maître barbier perruquier, tous habitants du dit St Arnoult, faisant et

représentant la plus saine et considérable partie d’iceux icy

présents et pour l’effet cy après assemblés que feu Me Louis Guilloire,

vivant seigneur du Mesnil ,conseiller du Roi , ancien avocat général en la

Cour des monnoyes à Paris auroit par son testament reçu devant

feu Me André Perret tabellion en ce lieu# contrôlé et insinué à Dourdan

par Doublet les trois et vingt un novembre présent mois ,donné

et légué à la dite église paroissialle dudit St Arnoult pour aider à y avoir

une maîtresse d’école qui enseignat aux pauvres jeunes filles de la ditte

paroisse à prier Dieu, lire et écrire et coudre la somme de cent

deux livres de rente en plusieurs parties à prendre sur différents

particuliers suivant les titres de création et reconnoissance d’icelluy

paiables par chacun an le jour de St Martin d’hiver , que ledit feu

sieur Guilloire auroit encore par son même testament cy dessus

datté légué à ladite église et fabrique la somme de vingt une

livres douze sols de rentes foncières et de bail d’héritages

aussi paiables par chacun an le jour de Saint Martin d’hiver à la

charge de faire dire à perpétuité le jour de son décès ou quelques

jours après deux messes basses de requiem pour le repos de son âme et de sa famille

 

#le 10 octobre 1710

 

Page 2

que ces legs bien loin d’estre onéreux etoient profitables tant à la

paroisse qu’à la fabrique et que rien n’empêchoit qu’on en fit

l’acceptation qui n’avoit été différé depuis tant d’années que

que par la crainte que l’on avoit que les seigneurs du Mesnil ,successeurs

dudit sieur testateur ne voulussent s’approprier la chapelle de St François

dépendante de ladite église où reposoient les reliques de Saint Arnoult

et de Sainte Scariberge, la faire fermer et en interdire l’entrée et

sortie tant au sieur curé qui avoit  par cette chapelle un passage

de son presbitère dans le chœur de ladite église, mais encore aux

habitans dont plusieurs se plaçoient dans cette chapelle pendant

le service divin, que cette crainte n’avait plus lieu aujourd’huy

parce que Monsieur le comte de Graville à présent seigneur du

Mesnil n’entendoit point au moyen de cette acceptation s’approprier

La dite chapelle de Sainct François ni en  en empécher l’usage d’entrée et

sortie tant auxdits habitans et sieur curé, ne voulant

pour tout droit dans cette chapelle que celuy d’y poser un banc

toutefois ni nuisible ni incommode, renonceant à cette fin en

tant que besoin est ou seroit à la clause insérée audit testament

concernant ladite chapelle, laquelle seroit nulle et de nul

effet qu’après cette déclaration et un désistement de cette

nature que le dit comte de Graville offroit de faire

même devant notaire, il ne se trouvoit plus d’obstacle

qui retardat l’acceptation de legs si avantageux que la

délibération de l’assemblée desdits habitants, sur quoy ,après que

lecture leur a été faite par le notaire soussigné du testament dudit

feu sieur Guilloire et que lesdits habitans ont conféré long

temps ensemble, ils ont tous d’une commune et unanime voix

conjointement avec lesdits sieurs curé et marguilliers les deux

legs faits par feu mondit sieur Guilloire par son dit testament

dudit jour dix octobre mil sept cent dix, scavoir le

legs de cent deux livres de rente en plusieurs parties

Page 3

pour l’entretien et subsistance d’une maîtresse d’école et celui de

vingt et une livres douze sols de rente au proffit seul de ladite

fabrique dudit Saint Arnoult,avec les charges y portées

la présente acceptation faite toutefois aux conditions cy après :

1o  que le dit sieur comte de Graville à présent seigneur

du Mesnil fera sa déclaration par devant notaire comme il n’entend

point s’approprier la chapelle de St François ni en fermer le

passage et entrée auxdits habitants ausquels en tant que

besoin sera il en abandonne la propriété et jouissance pour

disposer avec lesdits curé et marguilliers ainsi qu’ils ont fait

par le passé, ne voulant pour tout droit dans cette chapelle

que celui d’y faire poser un banc, toutefois non nuisible ni

incomode ; à quoy lesdits habitants acquiessent tous volontiers

2o que les sieurs administrateurs de l’Hôtel Dieu dudit St Arnoult

ne se chargeront que du recouvrement des rentes qui sont

encore perceptibles en leur remettant les titres sous leurs

récépissés attendu que plusieurs parties de ces rentes sont

entierement  prescriptes par un laps de plus de trente années.

3o que les arrérages de toutes leurdites rentes, les droits

de contrôle et insinuation tant dudit testament que codicile

préalablement remboursés, il en appartiendra moitié audit

Hôtel Dieu avec ceux qui se trouveront dues au jour du décès

dudit feu sieur Guilloire qui les luy a légués par son dit

testament et l’autre moitié à l’église et fabrique dudit Saint Arnoult

qui poura si bon luy semble employer en une acquisition d’ un fond

de onze livres douze sols deux deniers de rente au lieu et

place de celle que ledit feu sieur Guilloire a légué à ladite fabrique

à prendre sur les nommés Lucas et Paillard dont on ne poura

le faire paier faute d’avoir les titres qui sont adhérés.

Page 4

4o que la maîtresse d’école qui sera choisie par ledit sieur curé

ne sera paiée desdites rentes que du jour de sa réception jusqu’auquel

temps lesdits Hôtel Dieu et fabrique en toucheront les arrérages

concurrement lesdits droits de contrôle et insinuation desdits testaments

et codicile prélevés et ont lesdits sieurs curé et marguilliers reconnu

avoir dès à présent en leurs mains tous les legs constitutifs

d’icelles rentes à l’exception de ceux concernans la rente de

onze livres tant deson. à prendre sur les lucas et paillard

qui sont perdus et adhérés. Fait et passé à St Arnoult

dite assemblée au banc du dit œuvre et fabrique dudit Saint

Arnoult les jour et an que dessus, présence de Dominique

Henry,maître des petites écoles et Pierre Bailly, cordonnier

demeurant à St Arnoult témoins et ont signé ,excepté les dits

Riffault et Bailly qui ont déclaré ne scavoir écrire ni

signer de ce interpellés suivant l’ordonnance.

 

 

contrôlé a Dourdan le 7 em  décembre 1729

quatre sols